Laissez vous conter Arques la Bataille ! Difficile de résumer un passé aussi riche que celui de la cité arquaise, comme en témoignent ses rues et ses monuments.
Henry IV à la bataille d'Arques Ecole flamande 17ème. Musée national du Château de Pau
L'origine de la première partie du nom de la commune dériverait vraisemblablement du latin "Arcae" désignant les arches des ponts jetés sur les embranchements de rivières. Leur franchissement se faisait en cet endroit pour relier Rouen à l'extrême nord de la province. Elle doit la seconde partie au fait qu'Henri IV, alors Henri de Navarre, commença sa conquête du Royaume de France par Arques, où il livra bataille aux Armées de la Ligue (décret autorisant ce nouveau nom paru le 13 novembre 1882).
Le blason d'Arques-la-Bataille reproduit pratiquement le sceau de la vicomté d'Arques daté de 1315, représentant ces arches associées à la forteresse.Si l'on se réfère aux découvertes archéologiques de la deuxième moitié du XIXe siècle, Arques-la-Bataille fut de tous temps un lieu de passage. Un gué permettait, dès l'époque préhistorique, le franchissement de la Varenne. Les romains reprirent le trajet à leur compte pour la voie menant à Eu (actuelle rue de la chaussée). Un pont facilita la traversée de la rivière.
Sous la domination romaine, le territoire d'Arques faisait parti de la cité des Calètes. A l'époque mérovingienne, une nouvelle organisation se met en place : les "Pagus" ou pays. Arques devient la ville la plus importante et donc la capitale du Pagus de Talou dont les limites correspondent à peu près à l'actuel arrondissement de Dieppe. Au cours des temps, le Pagus devint Comté, puis Vicomté, Baillage et Election. La Révolution de 1789 fît disparaître cette antique division.
Signe de l'importance d'Arques au XIe siècle, Gozelin, ancien vicomte de Rouen devenu vicomte d'Arques, transfère dans son nouveau fief le droit de garde et de vérification des Poids et Mesures. Ce droit resta attaché à Arques jusqu'en 1789. L'étalon des mesures de capacité est le Pot d'Arques qui contenait 1.829 litre. Cet étalon fit son chemin puisque Louis XIV le proclama " première mesure du royaume ". Le musée des Antiquités de Rouen conserve d'ailleurs un étalon du XVIe siècle et des mesures de Rouen et de Paris étalonnées sur le Pot d'Arques.
Le 21 septembre 1589, Henri IV remporte la bataille d'Arques. Officiellement roi de France, Henri IV se voit fermer les portes de Paris, on ne veut pas d'un protestant pour diriger le royaume. La conquête du trône va commencer par Arques. D'un côté, Henri de Navarre avec une armée de 15 000 hommes, de l'autre Charles de Lorraine, duc de Mayenne, chef des armées de la Ligue, fort d'une armée de 30 000 hommes. Abandonnant le siège de Paris, Henri IV s'était replié en Normandie pour attendre des renforts anglais. Mayenne le poursuit, jurant aux parisiens de ramener le Béarnais "pieds et poings liés". Henri, accueilli avec enthousiasme par Dieppe, fief protestant, se retranche à Arques sur une position choisie à l'avance par le maréchal de Biron. Maître du château et de l'éperon situé à l'extrémité de la forêt (coteau Saint Etienne), il tenait les deux accès de Dieppe et attendait Mayenne. Ce dernier arriva par la vallée de l'Eaulne et s'installa, après quelques escarmouches, à Martin-Eglise. Il décida d'attaquer le matin du 21 septembre. Un épais brouillard favorisa sa marche et réduisit l'action de l'artillerie d'Henri pendant les premières heures. Usant de perfidie, Mayenne envoya des lansquenets qui, au cri de " vive le roi " furent reçus comme des transfuges. Ils ne tardèrent pas à retourner leurs armes contre ceux qui les avaient accueillis. C'est en cette sombre conjoncture que Henri s'écria " Ne se trouve-t-il pas en France cinquante gentilshommes pour mourir avec leur roi ? ", et reprenant l'offensive, il rejette une partie des ligueurs dans les marais de la vallée d'Arques. Alors précisément le brouillard se dissipe. L'artillerie du château foudroie les troupes de Mayenne qui ordonne la retraite. Ne pouvant s'emparer davantage de Dieppe, le duc dût abandonner la place.
Du XVIIe au XIXe siècle, l'importance d'Arques ne cesse de diminuer au profit de celle de Dieppe. Louis XVI désaffecte la citadelle dont les habitants sont autorisés à prendre les pierres. En 1836, une bande noire se propose d'en assurer la démolition complète et d'en revendre les matériaux. Un mouvement d'intérêt pour cette ruine formidable s'organise autour d'Achille Déville et M. Jules Reiset (propriétaire) sauve le monument.
A la fin du XIXe siècle, Arques s'industrialise fortement et rapidement avec l'arrivée du chemin de fer, le commerce du charbon et des phosphates, et surtout en 1903, avec l'installation de la Société Française de la Viscose. Ce site industriel a profondément marqué la vie sociale arquaise (cité ouvrière, groupements associatifs, écoles, doublement de la population en cinquante ans).